Et si Fitzgibbon n’était que le premier à quitter un navire à la dérive?
Bock-Côté
On savait que Pierre Fitzgibbon démissionnerait plus tôt que tard. C’est maintenant fait.
Il n’en demeure pas moins qu’en quittant ainsi, brutalement, il laisse les siens dans l’embarras.
Le superministre économique n’est plus, ses ministères sont orphelins. Ils seront nombreux, assurément, vouloir se partager sa dépouille politique.
Petit problème pour la CAQ toutefois: la démission de Fitzgibbon de l’Assemblée nationale entraînera une élection partielle d’ici six mois dans Terrebonne.
Il s’agit d’une circonscription représentative de la population du 450 sur la Rive-Nord. Et si la tendance se maintient, le PQ l’emportera.
Conservateurs
Il reprendra donc pied dans un territoire qui lui était historiquement favorable, et qui est l'un des bastions du nationalisme québécois. Le 450 marquerait alors son passage de l’autonomisme au souverainisme.
Je note, en passant, que le nationalisme version 450 est «identitaire» et ne s’en excuse pas.
Le remplacement de la CAQ par le PQ comme principal parti nationaliste serait alors confirmé.
Mais les problèmes de la CAQ ne s’arrêtent pas l.
On prête Eric Girard le désir de se présenter, dans quelques mois, avec les conservateurs de Pierre Poilievre. Il y serait sa place.
François Legault verrait toutefois son équipe économique réduite une peau de chagrin. Certes, Eric Girard n’est pas une figure charismatique, mais il représente une vraie crédibilité.
Spéculons un peu: certaines figures de l’aile fédéraliste de la CAQ seraient-elles tentées de faire elles aussi le saut Ottawa, avec les conservateurs, pour retrouver l-bas un pouvoir qu’elles pourraient bien perdre Québec en 2026?
Il manque aux conservateurs fédéraux quelques figures féminines fortes. Est-ce qu’une Geneviève Guilbault pourrait être tentée de les rejoindre? Elle ne manque pas de talent ni d’ambition, mais son talent comme son ambition s’exprimeraient probablement mieux dans le cadre canadien que dans le cadre québécois.
Elle incarnerait aussi la droite de Québec dans ce qu’elle a de plus combatif, de plus vigoureux. Ces candidatures permettraient aux conservateurs de mieux riposter aux charges délirantes comme celle de Magali Picard, qui a dérapé dans son attaque contre Pierre Poilievre.
Poilievre
Chose certaine, la question de ces prochaines défections surgira tôt ou tard.
À l’échelle de l’histoire, ce ne serait pas la première fois que les conservateurs fédéralistes désormais orphelins au Québec se projetteraient sur la scène fédérale, dans une coalition nouvelle.
On l’a vu avec l’histoire de l’Union nationale, partir des années 1970. Une bonne partie de ses troupes migrèrent vers le Parti Québécois. Une autre, quelques années plus tard, se reconvertit dans le Parti conservateur fédéral alors dirigé par Brian Mulroney.
Il se pourrait bien que nous revivions en ce moment une semblable histoire. Non pas l’identique. Et tout n’est pas joué. Mais le rapprochement est tentant.
L’histoire de la CAQ n’est pas terminée. Mais il est possible qu’elle entre dans cette étrange période politique qu’on appelle le début de la fin.